Conférence internationale de Lesbos (Grèce)
Compte tenu de ses connaissances juridiques en droit d’immigration et de son expérience professionnelle dans la région de l’Afrique du Nord, Maitre ZERGUINE a participé à la conférence internationale qui s’est tenue à l’île de Lesbos (Grèce) du 10 au 11 mai 2018.
Cette conférence s’est déroulée dans le cadre de l’initiative » Last Rights « . Un projet qui porte sur les droits des migrants et des réfugiés disparus et décédés et des membres de leur famille endeuillés.
Avec un objectif de réunir les parties prenantes du monde entier afin d’élaborer un protocole international précisant les obligations des États et fixant les principes directeurs des meilleures pratiques.
L’initiative dans son ensemble bénéficie de l’appui du rapporteur spécial des Nations unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et de la Rapporteur sur les droits de l’homme des migrants, qui ont participé en tant qu’orateur principal.
Cette conférence s’est déroulée sous la forme d’une réunion d’un groupe de travail d’experts, au cours de laquelle les participants ont contribué, avec leur expertise, à la préparation des documents finaux.
Ces travaux se sont soldés par la signature de la déclaration de Mytilini, adoptée par la commission nationale grecque des droits de l’homme (GNCHR), en vu d’être présenté à l’assemblée générale de l’ONU.
L’intégralité de la déclaration :
Nous, soussignés, affirmons dans cette déclaration pour un traitement digne de toutes les personnes disparues et décédées pendant leurs parcours migratoires et de leurs familles
(La déclaration de Mytilène)
Reconnaissons
Le droit inhérent à la vie
« …l’importance de respecter et de garantir le droit à la vérité afin de contribuer à mettre fin
à l’impunité et de promouvoir et protéger les droits de l’Homme »
Et que
“…les êtres humains ont le droit de ne pas perdre leur identité après la mort…”
Nous appelons également l’ensemble des États à traiter toutes les personnes sur un pied
d’égalité, sans distinction de race, nationalité, sexe, identité ou expression de genre,
orientation / identité sexuelle, religion, âge, aptitude, capacité ou statut de toute nature.
Et en accord avec leurs obligations légales internationales et devoirs de :
A.
1. Fournir des passages sûrs pour les personnes en recherche de sécurité
2. Cesser tous types d’actions pouvant mener à des refoulements.
3. Renforcer les protocoles des opérations de recherches et de sauvetage pour
toutes les personnes migrantes, y compris les personnes disparues.
4. Coopérer avec les victimes, les familles, les associations de familles et la
société civile, sans les entraver dans leurs démarches ni les poursuivre, dans
l'exercice légitime et humanitaire de la recherche, du sauvetage et du soutien
aux personnes migrantes.
5. Collecter, examiner et préserver tous les corps.
6. Respecter les corps des personnes décédées et garantir la chaine de
responsabilité du moment de leur récupération jusqu’à leur destination finale.
7. Prendre toutes les mesures raisonnables pour identifier le défunt et déterminer
la cause et les circonstances du décès.
8. Entreprendre des enquêtes efficaces pour rendre justice, rendre compte et
obtenir réparation.
9. Recueillir et conserver pour toutes les personnes migrantes disparues, les
données ante mortem, les antécédents et les informations génétiques de leurs
familles biologiques ; ainsi que collecter et conserver pour l’ensemble des
restes non identifiés toutes les informations récupérées dont les informations
post mortem, y compris les échantillons d'ADN post mortem.
10. Préserver tous les effets personnels de la personne décédée et les rendre à la
famille.
11. Fournir toute l’assistance nécessaire aux familles des personnes migrantes
décédées identifiées pour la délivrance de l’acte de décès.
12. Mettre en place des procédures accessibles aux familles nécessitant une
présomption de décès et des certificats de présomption d'absence.
13. Déployer tous les efforts nécessaires pour localiser et informer la famille des
personnes décédées et disparues.
14. Faciliter le rapatriement des personnes décédées à leurs familles lorsque cela
est possible.
15. Lorsque les personnes décédées ne sont pas rapatriées aux familles, les
conserver d’une manière digne et respectueuse pour la personne.
16. Tenir les registres des lieux de sépulture des personnes non identifiées et non
réclamées, e respecter et entretenir les tombes dans les pays où les corps sont
retrouvés.
17. Fournir une protection spéciale aux enfants des personnes migrantes
décédées et disparues.
18. Créer des mécanismes nationaux dans les pays d’origine, de transit et/ou de
destination relatif aux personnes migrantes disparues, qui devraient inclure les
gouvernements, la société civile, les familles, les associations de familles, les
communautés de personnes migrantes et les personnes expertes.
B. Les droits des personnes disparues et décédées et de leurs familles endeuillées
incluent, mais ne sont pas limités aux suivants :
1. Les membres de la famille d’une personne disparue ou décédée, ou toute autre personne
concernée, y compris les témoins du décès ou de la disparition, quel que soit l’endroit où ils
résident, ne doivent pas être placés en rétention administrative et/ou expulsés pendant
l’enquête ou les procédures administratives et judiciaires.
2. Les membres de la famille ont le droit de choisir la ou les organisation (s) de la société
civile et le (s) représentant (s) juridique (s) qu'ils souhaitent les voir les assister, les soutenir
et défendre leurs intérêts, à tout moment, pendant tout le processus et les procédures
concernant la recherche, l'identification et l’exercice de leurs droits concernant leurs proches
disparus et décédés, y compris les sanctions et les réparations, le cas échéant.
3. Les membres de la famille d'une personne disparue ou décédée ont le droit d'être gardés
informés et consultés à tous les stades de l'enquête, des procédures administratives et
judiciaires, dans la recherche et la récupération des personnes disparues et décédées,
membres de leur famille ainsi que de leurs effets personnels.
4. Les membres de la famille d'une personne disparue ou décédée devraient recevoir de
de l’État, tout l’appui et l’aide nécessaires afin de faciliter leur droit à une participation
appropriée et efficace à l'enquête ainsi que fournir une aide judiciaire, l’accès à la
documentation relative aux recherches d’un ou des membres de leur famille disparus et
décédés, ainsi qu’à leurs effets personnels, que ce soit sur terre ou en mer.
5. Les membres de la famille d'une personne disparue ou décédée doivent, à tout moment,
être en mesure de donner leur consentement éclairé pour toutes les mesures à prendre par
les autorités et par celles et ceux agissant en leur nom.
6. Les membres de la famille d'une personne décédée devraient pouvoir décider du lieu, de
l’heure et du mode d’arrangement funéraire appropriés, que ce soit temporaire ou de façon
permanente ainsi que la destination finale pour le repos du corps, et ce, d'une manière digne
et respectueuse pour la personne.
7. Les membres de la famille devraient être assistés pour planifier et participer aux rites
funéraires de leur proche décédé, y compris, le cas échéant, par une aide financière, par des
procédures accélérées pour accéder à un statut administratif et des visas.
8. Les membres de la famille devraient être autorisés, dans un délai raisonnable, à visiter
l’endroit où repose le corps de leur proche décédé, y compris avant les funérailles, ainsi que
les lieux où reposent temporairement le corps tels que ceux fournis par les entreprises de
pompes funèbres, y compris pour permettre l'exécution de rituels à ce moment, mais
également ensuite, au moment de visiter le lieu de repos final du corps ou le site
commémoratif.
9. Les membres de la famille devraient être autorisés, dans la mesure du possible et dans un
délai raisonnable, à visiter le lieu du décès de leur proche, connu ou estimé, ou le lieu où ce
dernier a été vu, ou bien encore, où son passage est connu pour la dernière fois, y compris
pour permettre la réalisation des rituels funéraires.
10. Les moyens de soutien et d’assistance devraient, sous réserve de révisions régulières,
être mis à disposition jusqu’à ce que la personne disparue ait été localisée ou que le corps
de la personne décédée ait été récupéré, identifié et enterré dans le respect de la loi, y
compris la clôture de toute enquête médico-légale/enquête judiciaire ou toutes procédures
liées.
11. Une protection et un soutien spéciaux doivent être assurés aux enfants à tout moment,
conformément à la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant de 1989.
12. L’intérêt supérieur de tout enfant touché par le décès ou la disparition d’un parent ou
autre membre de la famille proche sont des considérations primordiales dans la mise en
œuvre des services mentionnés ci-dessus, ainsi qu’un soutien individuel à leur famille dans
leur ensemble, y compris le maintien ou la restauration de l’unité familiale, dès que possible,
pour tout enfant ayant des parents survivants, conformément aux intérêts supérieurs de ces
derniers.
De plus, nous nous engageons également à inclure, comme protocole à cette déclaration, un
glossaire, des lignes directrices et une note explicative des droits et principes énoncés dans
le présent document.
Signé le onze mai deux mille dix-huit (11 mai 2018)
We the undersigned make this Declaration
for the Dignified Treatment of all Missing and Deceased Persons and their Families
as a Consequence of Migrant Journeys
(The Mytilini Declaration)
Recognizing
The inherent right to life
and
“…the importance of respecting and ensuring the right to the truth so as to contribute to ending impunity and to promote and protect human rights”
and that
“…human beings have the right not to lose their identities after death…”
and call upon all States, to treat all persons equally, irrespective of their race, nationality, gender, gender identity or expression, sexual orientation/identity, religion, age, ability, capacity or status of any kind,
and in accordance with their international legal obligations and duties to:
1. Provide safe passage for those seeking safety;
2. Desist from all actions that may lead to refoulement;
3. Strengthen protocols for search and rescue for all migrants including those who are missing 4. Cooperate with and not obstruct or prosecute victims, families, family associations, and civil society in the legitimate exercise of humanitarian search, rescue and support of migrants
5. Collect, examine and preserve all bodies;
6. Respect the bodies of the dead and guarantee chain of custody of the bodies from recovery to the final destination;
7. Take all reasonable steps to identify the deceased and to determine the cause and manner of death;
8. Undertake effective investigations to deliver justice, accountability and reparations
9. Collect and preserve for all missing migrants ante mortem and background information and genetic information of the biological relatives; and collect and preserve for all unidentified remains all recovery and post mortem information, including post mortem DNA samples.
10. Preserve any personal effects of the dead, and restore them to the family;
11. Provide all necessary assistance to families of identified deceased migrants for the issuance of a death certificate;
12. Develop accessible procedures for families requiring presumption of death and presumption of absence certificates;
13. Make every effort to locate and notify the family of the dead and missing;
14. Facilitate repatriation of the remains of the dead to their family if possible;
15. Where the remains are not repatriated to the family, dispose of them in a manner that is dignified and respectful to the person ;
16. Record the location of burial of the unclaimed and unidentified remains and to respect and maintain gravesites in the countries where the bodies are found.
17. Provide special protection for children of the missing and the dead migrants
18. Create national mechanisms in countries of origin, transit and/or destination related to the missing migrants, which should include governments, civil society, families, associations of families, migrant communities and experts.
The rights of the missing and of the deceased and their bereaved families include but are not limited to the following:
1. Family members of a missing or deceased person, or other relevant persons, including witnesses, wherever residing, should not be subjected to administrative detention and/or expulsion or proceedings for removal or expulsion, at any stage of investigation, administrative and legal proceedings.
2. Family members shall have the right to choose the civil society organization(s) and legal representative(s) they wish to assist and support them and to advocate on their behalf at any stage, in all processes and proceedings concerning the search, identification, investigation and resolution of their rights in relation to their missing and their deceased relatives, including sanction and reparation where appropriate.
3. Family members of a missing or deceased person have the right to be kept informed and be consulted at all stages of investigation, administrative and legal procedures, in the search for and recovery of, missing and deceased family members and their personal effects.
4. Family members of a missing or deceased person should receive from State authorities, all necessary support and assistance to facilitate their right to appropriate and effective participation in the investigation and be provided with legal aid, access to documentation involving the search for recovery of missing and deceased family members and their personal effects whether on land or at sea.
5. Family members of a missing or deceased person must at all times be enabled to give fully informed consent to all steps to be taken by authorities and those acting on their behalf
6. Family members of a deceased person should, be able to decide upon the appropriate place, time and manner of funerary arrangements, whether temporary or permanent and the final destination for the laying to rest of their remains in a manner that is dignified and respectful to the person.
7. Family members should be assisted to plan and participate in the funeral rites of their deceased relative, including where necessary, financial assistance and expedited immigration status and visa arrangements.
8. Family members should be enabled, on reasonable notice, to visit the place of rest of their deceased relative including, prior to a funeral, places of temporary rest such as those provided by undertakers, including to enable performance of rituals not only at the time, but thereafter to visit the place of final rest or memorial site
9. Family members should be enabled, where practicable, on reasonable notice, to visit the place where their relative is known or thought to have died or where they were last seen or known to have been, including to enable performance of rituals
10. Support and assistance facilities should, subject to regular review, be made available until the missing person has been located or the deceased has been recovered, identified and laid to rest after due process of law including completion of any judicial investigation/inquest or related proceedings. 11. Special protection and support must be assured to children at all times, in accordance with the 1989 UN Convention on the Rights of the Child
12. The best interests of any child affected by the death or missing status of a parent or other close family member are of primary consideration in the provision of any of the above services, support to them individually, and to their family as a whole, including maintaining or restoring family unity for any child affected, with surviving relatives, as soon as possible, in accordance with their best interests.
And we further commit to include as a Protocol to this Declaration a Glossary, Guidelines and Explanatory Note of the rights and principles set out herein.
Signed this eleventh day of May two thousand and eighteen (11th May of 2018)
as the “Mytilini Declaration” at Thermi,
Mytilini, Lesvos, Greece